Mélanie Noël
Autour de « Inséparables distances »
Les distances qui nous font ressentir les solitudes. Et les liens qui nous maintiennent en vie et qui nous rendent inséparables.
Les lieux solitaires de nos existences lorsqu’on nous quitte pour s’installer dans l’indifférence, pour découvrir le reste du monde ou traverser vers la mort. Ce qu’on cherche à laisser chez ceux que l’on croise et ce que nous garderons d’eux au-delà des absences.
Il est fait de courts poèmes en images accessibles directement par la voie du cœur. Il traduit en mots un point de vue critique mais sans apitoiement dégageant une tendresse et une lumière qui tend vers l’espoir et l’acceptation des fatalités.
Je n’ai pas la prétention de croire que mon recueil est essentiel, sinon par sa place, tel un grain de sable, dans l’ensemble des créations artistiques qui s’étendent en plages marquant les frontières de nos identités. Un lieu où se réfugier, fuir ou, au contraire, se rencontrer. À l’ombre du bien-être ou sous les rayons d’une vérité qui dérange ou réconforte.
Tous ceux qui m’entourent. Autant les personnes qui dorment ou ont déjà dormi sous le même toit que moi que ceux que j’observe à distances variables ou ceux que je n’ai jamais vus et que j’aime imaginer. Tous les petits gestes, les paroles sincères ou banales, les silences lourds ou précieux filtrés par ce qui m’habite. En résumé, filtrés par la peur de les perdre. De nous perdre. Et le désir d’apprivoiser ces pertes.
J’écris à ceux qui m’ont précédée, ceux qui m’accompagnent, ceux qui suivront. Et finalement l’ensemble de ces derniers.
je vous ai embrassés sur les lèvres d’étrangers
caressés sur leurs joues
les cicatrices vous embellissant
j’ai aimé à visage découvert
parfois par intermédiaire
je marche contre le vent depuis si longtemps
qu’il a érodé une couche de moi
il en faudrait peu
pour que je vous montre qui je suis
l’écorce humaine
à vif
en falaises
à sauter en désespérés
à gravir en exploits
la terre un instant avec vous
Le troisième chapitre s’inspire d’un mélange du lien qui m’unit à mon père et d’une grande amitié que j’ai développée avec Léo qui, avant de devenir mon grand ami, était celui de mon père depuis leurs études universitaires. On s’est rapprochés lorsque Léo m’a demandé de composer un texte sur sa complice de toujours devenue son grand amour, celle qui était alors condamnée. On s’est rencontrés à plusieurs reprises pour qu’il me parle d’elle. Et quand elle est partie, il m’a demandé de lire le texte à ses funérailles. Dix ans plus tard, le hasard a fait en sorte que mon père et Léo se sont retrouvés sur le même étage à l’hôpital. Les vieux chums de l’université ont eu droit à une ultime rencontre. Un alité, l’autre en fauteuil roulant. Les deux en jaquette. Mon père a eu son congé de l’hôpital. Léo, son congé de la vie. J’ai eu la chance de l’accompagner, jour après jour, jusqu’au dernier.