Journal d’un dernier voyage

Comment persister au milieu des restes d’une vie qui fut en même temps en dehors et en dedans de nous ? Comment survivre à la disparition d’une part de notre être qui s’arrache pour disparaître à jamais ? À une existence à deux qui était le seul grand voyage porteur de tous les sens du mot vivre ? C’est à ces questions que répond Carole Massé, du fond d’une douleur lancinante, dans son nouveau recueil aux Écrits des Forges, Journal d’un dernier voyage.

Nous nous consacrons dans cette maison à une tâche inhumaine : aimer et se détacher, adorer et se raisonner, fusionner et se distancier. Pour se protéger l’un l’autre d’une lente et irréversible fracture de l’Être.

À la fois cri, blessure insoutenable et hommage à un homme avec lequel la narratrice a partagé 32 ans de sa vie, ce Journal utilise plusieurs formes : poésie, prose et quasi silence, dans une désintégration du langage qui fait puissamment ressentir le vide créé par l’absence. En écrivant sa souffrance, en l’extirpant un tant soit peu d’elle-même par le pouvoir du verbe, Carole Massé tente de continuer à respirer à travers les mots qui portent la mémoire.

Comment ce qui est
pourrait-il ne plus être
mais moi, être encore?
(…)
Te garder au présent
dans tous les verbes
et chasser les passés.
(…)
Ces signes tracés sur papier
étaient les ballons d’oxygène d’une noyée.