Description
TRADUCTION : Gérard Lemarquis
Cette présentation de la poésie contemporaine islandaise commence en 1945, coïncidant avec l’indépendance de ce pays en 1944. Toute chargée de mémoire qu’elle puisse être, son élan ne sera plus rappel de l’ancienne alliance, mais une démystification.
À partir du moment où il n’est plus possible, comme au temps des scaldes ou de leurs suiveurs, de créer de nouveaux tropes trompeurs, la poésie d’allégorie systématique, d’hermétisme gratuit, devient caduque. S’y engouffre l’air salubre d’une poésie lucide, tournée vers toutes les formes du réel, du concret, du quotidien, de l’insolite ; poésie de liberté, d’auscultation, d’exorcisme, de conjuration des forces néfastes de la société. Que ce soit par mépris, dérision et sarcasme, que ces poètes aient été traités par leurs adversaires « d’atomiques » (allusion aux effets d’Hiroshima comme à la dure querelle née de l’installation d’une base militaire à Keflavik), puisqu’ils osaient s’attaquer aux règles formelles de la poésie, au système dans lequel s’emprisonnaient la langue et la pensée, indique bien la poussée subversive d’un mouvement qui refuse d’être dupe des idéaux traditionnels.
Extrait de la préface de Jean-Louis Depierris
IL EN FUT
« Il en fut ainsi cet automne
les feuilles ne tombèrent pas
contrairement à l’habitude
mais
les arbres se tenaient verts
et nous par la main
jusqu’à
ce que le destin jaune, très jaune
me pince
au moment où
tombaient les feuilles »