Diptyque du garçon

Pour son dixième recueil aux Écrits des Forges, le poète Dominique Lauzon nous propose un panorama insolite : la vision d’une vie consacrée à l’écriture en tant que plongée dans les profondeurs de ce qui nous crée, de ce que nous créons, à travers les blessures apparemment insondables de l’âme et du cœur. Cette vie, consacrée à l’écriture, est également consacrée par l’écriture, utilisée comme moyen d’exhumer l’origine des torpeurs et des barrages qui anéantissent tous les possibles.

Quête poétique en même temps que travail d’excavation, projet de libération, hommage à l’écriture, tel est le Diptyque du garçon. Celui-ci est également une invitation, pour le lecteur, à regarder à l’intérieur, tout comme l’auteur a osé lui-même le faire. L’expérience poétique est une révélation de notre condition originelle, écrivait Octavio Paz. Ces mots pourraient être ceux de Dominique Lauzon, qui inlassablement fouille les sources de l’être pour en déployer toutes les chatoyantes couleurs sonores, cachées derrière les paravents de nos traumatismes les plus profonds.

poème tu t’abats dans beaucoup d’ombre
l’éphémère enchantait aujourd’hui il pulvérise
aucune envie de ne pas profaner la mort
poème qui a renversé encore
les statues de la beauté sans aspérité
sans souvenir presque sans regard
poème qui a suivi les courants inhumains
de la forme parfaite à tout prix
poème relance les travaux en élevant ton feu

Ce feu élevé, l’auteur le porte ici en offrant au monde le portrait d’une puissante reconstruction, de celles qui ne laissent plus de place aux rocailles de la mémoire, « Une épigénie sanguine dans la mémoire crayeuse ».